Originaire de Saint-Etienne, Lucien Peyraud avait toujours rêvé d’être vigneron. Quant à Lucie Tempier, elle était l’héritière du domaine éponyme établi depuis deux siècles dans le village du Castellet. Le couple convola en justes noces durant l’été 1936.
Leur première tâche fut de rénover le domaine qui avait souffert de la crise des années 1930. Par son esprit d’entreprise, Lucien devint vite une personnalité marquante de la région. Il milita pour que Bandol obtienne l’appellation d’origine contrôlée en 1941 et défendit sa vie durant le noble cépage mourvèdre. Ce dernier, parfaitement adapté aux terrasses argilo-calcaires de Bandol, les fameuses « restanques », est devenu emblématique de l’appellation. Le décret de l’AOC impose un minimum de 50 % de mourvèdre (jusqu’à 95 %) complétés par le grenache et le cinsault, ainsi que la syrah et le carignan (à hauteur de 10 % maximum pour ces derniers). Les rendements ne doivent pas dépasser 40 hl/ha pour une densité de 5000 pieds/ha. Enfin, le bandol rouge est un vin de patience qui n’exige pas moins de 18 mois d’élevage en fûts ou en foudres avant d’être mis en bouteilles. Tout autre type d’élevage étant exclu de l’AOC pour les rouges.
Dès les années 1960, les enfants de Lucie et Lucien Peyraud, Jean-Marie et François, créèrent les cuvées parcellaires qui ont fait la renommée du domaine :
La première d’entre elles, la cuvée « la Migoua », provient d’un terroir d’altitude (11 ha) de marnes triasiques dans le massif du Beausset-Vieux. Elle est composée de 55 % de mourvèdre, complétés par 25 % de cinsault, 15 % de grenache et 5 % de syrah. Son vin qui mérite de vieillir 10 ans est d’une suavité peu commune dans l’appellation.
Tout près du village du Castellet, sur un coteau de 5,5 ha exposé plein sud, est produite la cuvée « la Tourtine ». Le terroir composé de grès, de marnes et d’argile est planté à 85 % de mourvèdre. Ce terroir magnifie ce grand cépage qui y atteint sa pleine maturité tout en préservant sa finesse et sa grande capacité de garde (15 ans minimum). Le vin de la Tourtine conjugue une élégante structure à la finesse d’un terroir très complexe.
La cuvée parcellaire « Cabassaou » est issue d’un terroir de petites restanques (1,5 ha en amphithéâtre), en contrebas de la Tourtine, abrité du mistral. Les vignes âgées de 60 ans y bénéficient d’un micro climat très chaud, mais bien ventilé. Elles donnent un vin dense, serré, typique du mourvèdre (93 %), au potentiel de garde exceptionnel (20 ans et plus).
En 1999, un nouveau régisseur, Daniel Ravier, a été recruté afin de donner un nouveau souffle au domaine. Ce Savoyard d’origine a d’abord renouvelé le parc à foudres puis orienté le domaine vers des méthodes biologiques (sans certification) avant de passer à la biodynamie en 2013. La rigueur de ce travail a porté ses fruits et les vins de Tempier ont vite retrouvé le niveau d’excellence qui avait fait la gloire du domaine.
En 2018, le domaine Tempier a eu l’occasion de s’agrandir en rachetant le vignoble du domaine de la Laidière. De 38 ha le domaine est passé à près de 60 ha. Cette acquisition a constitué un nouveau défi pour Daniel Ravier et son équipe car ce vignoble en pente a dû être entièrement restructuré. Ces terroirs frais, orientés à l’est, permettent à Tempier de produire plus de blancs et de rosés qu’auparavant, deux couleurs très demandées à Bandol. Le domaine a entamé une démarche de certification biologique en 2022 qui ne fait qu’officialiser des pratiques bien ancrées dans son histoire.